Les dépressifs viennent de Melancholia
Il est communément admis qu'il n'est pas souhaitable de dévoiler la fin d'un film, le dénouement d'une intrigue, aux personnes qui s'apprêtent à en commencer le visionnage. C'est même pas très sympa.
D'autres, au contraire, pensent que c'est préférable pour apprécier le film. Ce sont des gens très sérieux, et Ecrans.fr y a consacré un article. On y découvre notamment que ce principe est valable pour n'importe quel objet, littéraire, cinématographique, etc. pour lequel il y a une intrigue quelconque.
Ici, il s'agira uniquement d'un film, le dernier de Lars Von Trier, en l'occurrence, nommé Melancholia. Waouh, ça donne vachement envie ! Sachant que Larsie nous a parfois habitués à des drames psychologiques un peu durs, voire poussant carrément au suicide (voir Breaking the Waves), on n'aura peut-être pas forcément envie de pousser la porte du cinoche pour se taper les 2h10 d'un film que l'on imagine être horriblement triste.
J'ai personnellement pris le parti, à propos de ce qui est dit tout au début de cet article, de n'absolument rien dévoiler du film. Je fais encore partie des gens qui considèrent qu'il n'est pas forcément souhaitable de connaître la fin d'Usual Suspects ou de Sixième Sens avant de rabattre son strapontin (ou de démarrer son lecteur DVD).
Je garde cette ligne de conduite pour Melancholia, et vais tenter de vous en parler sans y faillir. Oh, bien sûr, la curiosité vous poussera probablement à aller voir le teaser du film, largement disponible sur Internet, et, ma foi, plutôt bien fait.
C'est qu'en fait, j'aimerais bien que vous alliez le voir dans le même état d'esprit que le mien lorsque je me suis assis en salle : je n'avais absolument aucune idée de quoi pouvait parler ce film. Aucune. Tout juste avais-je reconnu Kirsten Dunst sur l'affiche, et me rappelais de la récente sortie multi-critiquée de son réalisateur Lars Von Trier au dernier festival de Cannes, le film ayant été, quant à lui, alors très bien accueilli.
C'est qu'il faut généralement se méfier des œuvres encensées à Cannes : un courant parfois un peu élitiste parmi les jurys nous a souvent surpris, voire dégoûtés, et rabaissés au rang de spectateurs des masses, qui ne comprendront jamais rien au Septième Art.
Pour une fois, oserais-je penser, on peut dire qu'ils ne se sont pas plantés, et que Melancholia est vraiment un très bon film. Le genre de film qui reste, auquel on pense encore le lendemain, pour l'histoire, les images, l'ambiance...
Melancholia met en scène Kirsten Dunst (Justine) et Charlotte Gainsbourg (Claire), parfaites, toutes deux écrasées par l'inéluctabilité cosmique. Les deux sœurs se ressemblent, et sont pourtant si différentes. L'une rongée par la dépression, l'autre par l'angoisse d'une fatalité inévitable, le tout dans une image qui nous rappelle parfois le style du Dogme (auquel, si je ne m'abuse, Lars Von Trier a largement participé), très proche, sans fioritures, et malgré tout parfois grandiose.
La justesse des personnages et de leurs réactions aux événements est probablement une des clés de l'œuvre. On retiendra la légèreté du père (le fantastique John Hurt), la froideur de la mère (incarnée par le regard bleu acier de Charlotte Rampling), le matérialisme du mari de Claire (Kiefer Sutherland, parfait en autre chose que Jack Bauer) dans ce film en deux parties, chacune consacrée à l'une des deux sœurs, essentiellement sous forme de prétexte à une analyse plus profonde des relations humaines.
J'accorde une mention spéciale au jeu de Kirsten Dunst en mariée dépressive, dont la justesse du ton ne manquera pas de réveiller d'anciens démons mélancoliques chez certains spectateurs. Il suffit d'avoir côtoyé une personne atteinte de cette affection pour saisir le travail effectué sur le personnage.
Ne vous levez pas de votre fauteuil pendant le (très étonnant, mais magnifique) prologue, série de tableaux animés empruntés aux grands maîtres de la peinture (les amateurs du ralenti léché apprécieront), comme une table des matières de l'histoire à venir.
La planète Melancholia s'approche de la Terre. Va-t-elle la frôler d'un peu trop près ?
Un film cataclysmique, dans tous les sens du terme, loin des clichés du genre. Profitez de ce week-end qui s'annonce pluvieux pour vous enfermer dans une salle obscure à la découverte de Melancholia.
Allez, puisqu'on est dans le cosmique, vous apprécierez peut-être ça :
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